Roger Martin du Gard

Jean-Noël Jeanneney cherchait à réhabiliter Roger Martin du Gard. (Concordance des temps, France Culture.)

Je dis d’ordinaire que je ne me souviens pas de ce que je lis, mais les Thibaut, que j’ai lus dans mon adolescence, me sont restés en mémoire. Au moins en partie. Et le souvenir n’en est pas bon. C’était un roman fleuve comme ceux de Duhamel. Ce que je leur reprochais, c’était, comme les livres plus légers de Gide, de sentir leur âge. Ils n’étaient plus de mon temps. Ils prétendaient à des certitudes dont je doutais.

Ce que révèle Jean-Noël Jeanneney est que Roger Martin du Gard était un homme de l’affaire Dreyfus. Comme j’ai commencé à le soupçonner, cette affaire ne parlait pas d’antisémitisme, mais de vérité. Et la recherche de la vérité entraîne de devoir affronter le doute. Voilà pourquoi il était l’ami de Camus, et ne s’entendait pas avec Sartre.

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Montée des périls

Un mot sur la réforme des retraites.

Elle illustre la raison d’être de l’association des interpreneurs, dont je suis un des fondateurs.

Le remous qu’elle a créé montre que notre pays est extraordinairement fragile. Il n’a plus d’armée, d’industrie, est dépendant de l’étranger, et généralement de régimes qui ne lui veulent pas du bien, quasiment pour tout ce qu’il consomme, est criblé de dettes, a des services publics qui ne sont plus que l’ombre de ce qu’ils furent, et en plus est au bord de la guerre civile. Dans mes cours d’histoire, on parlait de « montée des périls ». Et je n’exagère pas.

Ce dont nous avons besoin c’est d’un changement d’état d’esprit. Mot d’ordre : « responsabilité ». Le citoyen doit prendre son sort en main et faire preuve de solidarité, pour relancer le pays « par en bas ».

Fin de mois

« Le vent tourne pour le parti des Verts, longtemps le favori des électeurs et des leaders d’opinion – et cela casse, pour la première fois, son image de représentant du côté lumineux de la force. ( ) les Verts chutent dans les sondages depuis des mois, passant de 23 % l’été dernier à 17 %, tandis que l’Alternative für Deutschland (AfD) d’extrême droite progresse régulièrement et se rapproche d’eux, à 15 %. En ce qui concerne les politiques climatiques, l’opposition se durcit : une initiative de dernière minute, principalement des démocrates, contre une législation interdisant les voitures à moteur à combustion semble trouver un écho auprès de l’électorat. Les propositions vertes pour une sortie anticipée du charbon irritent les habitants de l’Allemagne de l’Est. Et l’opposition à l’élimination, prévue d’ici l’année prochaine, des systèmes de chauffage au gaz et au mazout, grandit. » (Politico Allemagne.)

Des consultants me disent aussi que, depuis la guerre d’Ukraine, les entreprises se préoccupent de trouver des affaires à court terme. RSE et mission n’ont plus le vent en poupe, en dépit de l’annonce de lois européennes contraignantes. Il n’y a que les gens riches et heureux qui aient le loisir d’avoir peur de la fin du monde ?

Iraq, 20 ans après

Suite de l’enquête de la BBC, sur la guerre d’Iraq.

L’Iraq s’est instantanément dissout. Le spectacle qu’il donne fait penser à l’histoire de l’URSS au temps de la Glasnost. Simplement, il n’a pas été repris en main par un M.Poutine. Le chaos y règne toujours.

Cela a été une défaite complète pour l’Occident. Mais peut-être pas celle que l’on croit. En effet, comme au Mali ou en URSS, le monde était convaincu de la capacité de l’Occident à apporter la paix et la prospérité. Après tout, l’Iraq est un pays riche de ressources naturelles. Le spectacle ridicule qu’il a donné a fait douter de l’Occident. Quant aux opinions publiques occidentales, elles ont perdu toute confiance en leurs élites, qui les avaient menées en bateau.

En outre, une fausse leçon aurait été tirée de cette déroute. L’Occident ne serait plus intervenu, lorsqu’il aurait fallu le faire… M.Blair, à qui ce reportage réussit, explique qu’on ne le croyait plus, alors, qu’au contraire, c’était parce qu’il avait commis des erreurs que son expérience avait un intérêt. (Quel dirigeant français aurait reconnu s’être trompé ?)

A l’envers cela a encouragé M.Poutine à intervenir. En soutenant les dictatures, et en ne les lâchant pas. (Leçons de l’expérience occidentale ?)

L’Ukraine pourrait aussi être une conséquence de l’Iraq. Seulement, M.Poutine a commis la même erreur que M.Bush. Et, nouveau rebondissement paradoxal, il a redonné du poil de la bête à un Occident en pleine détresse existentielle.

Bac+5 pour tous

La France semble être un champion mondial du Bac+5 : 26% des dernières générations possède un master ! (De l’ordre de 3% en Corée du sud.) Ailleurs, on trouve généralement que la licence est suffisante à l’honnête homme. Et le master est souvent acquis comme un diplôme de spécialisation après un début de carrière plus ou moins long.

(Par ailleurs, en termes d’enseignement supérieur, la femme ridiculise l’homme : 31% à 21%. Il n’y a que chez les ingénieurs que l’homme garde un peu d’avance. Pas étonnant que le discours féministe ne s’intéresse qu’à eux, et passe sous silence l’inquiétant déséquilibre de formation, et bientôt de statut social ?, entre homme et femme.)

Comment expliquer ce phénomène ? Comme le disait un précédent article, Bac+5, en France, ne correspond pas à un savoir, mais à un statut.

Source : Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.

Mal français

Ce témoignage met le doigt sur ce qui ne va pas dans notre pays. Ce qui fait que, à cause de sa fragilité, une erreur de notre gouvernement pourrait le plonger dans l’anarchie. 

Nous avons un Etat qui a infantilisé les dirigeants d’entreprise (et probablement la nation) à tel point qu’ils n’ont pas conscience de la nature de leurs responsabilités. Conséquence : l’action de l’Etat produit l’envers de ses intentions.

Le nom du changement : responsabilité !  

Cadavre exquis

Dino Buzzati raconte l’histoire d’un inventeur qui a trouvé le moyen de programmer les étoiles pour qu’elles écrivent des messages publicitaires. Il meurt prématurément, laissant son travail à moitié fini. Nous nous épuisons depuis à les étudier.

J’ai l’impression qu’il en est de même des idées qui règlent notre vie. Elles avaient une origine très bête, mais on l’a oubliée. Du coup on se perd dans les théories les plus farfelues.

Grande armée

Les Ukrainiens demandent 200 Léopards, les Allemands en ont exporté 2000. Et nous ? Quel est le nombre de tanks français ? me suis-je demandé.

J’ai eu une réponse : 50. L’armée française n’est plus rien. Face à Poutine, la France n’aurait pas tenu 5 minutes.

Quand j’ai fait mon service militaire, j’ai été frappé par l’invraisemblable désorganisation de notre armée, et par son manque de moyens ridicule. Apparemment, les choses n’ont pas changé.

Il se peut aussi, que, non seulement elle n’a pas de moyens, mais elle est rançonnée. Au temps de Marcel Dassault la France fabriquait des avions à 30% du prix des américains. Je ne serais pas surpris que le rapport se soit inversé, aujourd’hui. Les Turcs, eux, ont compris l’art de la guerre moderne : le drone pas cher.

Où est le problème ? Je soupçonne que l’Etat a perdu de vue la nature réelle de sa mission. Il se noie dans une micro gestion dont il n’a pas les moyens.

(PS. Depuis, j’ai lu que les Russes auraient perdu, en date du 7 février dernier, 3245 tanks, soit plus de 60 fois le parc français !)

Torture animale

J’entendais parler de jeunes gens très brillants qui se sont engagés dans des études sur le cerveau. Pour un inculte tel que moi, leurs travaux sur l’animal ressortissent à des tortures difficilement concevables.

Bien sûr, on dira que l’homme est la mesure de toute chose, et que ces travaux profitent certainement à notre santé. Seulement, même cet argument n’est pas sûr. Car entre l’animal et l’homme, il n’y a qu’un cheveu. Et la tentation est grande de le franchir.

Alors, que faire ? Et si des scientifiques se donnaient pour contrainte de chercher à atteindre les mêmes objectifs que leurs collègues, mais avec d’autres moyens ? Qui sait ? Au moins cela ferait progresser la science.

Homo erectus

Homo erectus est celui de nos ancêtres qui a le mieux réussi. Il a duré 2m d’années.

Son évolution paraît illustrer la complexité du changement. Sa station debout lui a non seulement permis de libérer la main, mais aussi de se débarrasser de son pelage, ce qui l’a rendu capable d’évacuer la chaleur de l’effort en continu, et donc de devenir un coureur de fond, ce que n’est aucun autre animal. Il pouvait épuiser sa proie. Sa grosse tête serait le résultat d’une sélection naturelle qui veut que la femelle préfère les jolis coeurs inventant des bobards. En même temps, cette tête lui a permis de construire des sociétés complexes, qui sont sa meilleure assurance sur la vie. Sociétés dans lesquelles il est parvenu à vivre, parce que son niveau de testostérone a chu.

Voilà ce que j’ai retenu de In our time de la BBC. (Il n’est pas dit que je ne sois pas passé à côté d’informations essentielles.)

J’en ai aussi retenu que tout cela n’était qu’hypothèses. Et que la science de ma jeunesse, qui affirmait, a fait son temps.